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Home / Première Page / Colloque tenu au Sénat le 04/10/2017 : La contribution sociale des cultes reconnus à notre société

Intervention de Madame Evelyne HABERFELD, au nom du culte israélite :

Mesdames, Messieurs les membres de cette haute assemblée.

Mesdames, Messieurs

C’est un grand honneur pour moi de vous faire part aujourd’hui de ce que le judaïsme m’a apporté et m’apporte encore à ce jour dans ma vie de citoyenne belge.

Née à Ixelles de parents juifs viennois, rescapés de l’holocauste, j’ai toujours été particulièrement fière de pouvoir être une citoyenne belge parfaitement intégrée et acculturée dans ce pays qui a accueilli les membres restants de ma famille. Je voudrais ici cependant spécifier que j’estime que ma pratique religieuse fait partie de mon domaine privé, et même si je suis fort attachée à mes convictions religieuses, je me refuse à les porter en étendard dans ma vie publique. J’apprécie évidemment grandement que si je le voulais cela me serait parfaitement possible de par la loi belge. Grâce en soit rendue à notre démocratie.

Etant donné le passé traumatisant de mes parents, je considère que rester fidèle aux traditions et valeurs juives est pour moi un devoir mémoriel, c’est affirmer que tout ne s’est pas arrêté avec Auschwitz et que la vie a pu reprendre et continue encore.

Le judaïsme que mes parents m’ont inculqué est un judaïsme d’ouverture, de tolérance et d’accueil de l’autre. J’ai toujours eu l’impression que cette façon d’agir faisait partie de leur manière d’être mais ces lignes directrices et cet enseignement se trouvent dans notre texte sacré, la Torah. Il suffit que je me réfère au Lévitique qui m’impose d’aimer mon prochain comme moi-même. Mes parents, qui étaient pourtant peu pratiquants, avaient intégré cela dans leur ADN et me l’ont transmis. Je ne les remercierai jamais assez pour cela.

Ma religion par son appel constant à une éthique plus qu’exigeante, et mes nombreuses lectures de pensée juive m’aident à me sentir socialement responsable vis-à-vis des autres. La Torah nous enseigne à de multiples reprises que nous devons accueillir l’étranger et ne pas le molester car comme dit le texte « souviens-toi que tu as été étranger en Egypte ». Ce n’est pas toujours facile mais j’essaie d’appliquer ce principe. J’aime aussi me référer à Levinas lorsqu’il nous dit “Le visage de mon prochain est une altérité qui ouvre l’au-delà ». C’est tout cela que j’aime particulièrement dans la religion juive, c’est cette grande importance qu’elle donne à la relation avec les autres humains qui seule permet d’éventuellement trouver la transcendance. Si je ne me relie pas d’abord aux autres, je ne peux pas non plus me relier à Dieu. Je trouve cela une grande leçon pour vivre ensemble en harmonie. Nous ne pouvons pas nous isoler dans nos tours d’ivoire, nous devons rester à l’écoute des autres. Même la prière se doit d’être collective. L’action est primordiale dans le judaïsme. Il ne suffit pas de prier, d’aller à la synagogue, de respecter les lois de la Torah, non il faut absolument et avant tout agir, écouter celui qui souffre, aider celui qui a faim. Ma pratique me demande moins de paroles que d’actes.

J’espère avoir été et pouvoir continuer à être une citoyenne belge de religion juive, une personne ouverte sur le monde et consciente de mes devoirs sociétaux non seulement dans ma Communauté mais aussi au sein de la Cité.

J’espère que cette éthique, ces beaux textes qui ont traversé les siècles, m’aideront à rester une femme juive fidèle au passé de mon peuple mais aussi pleine d’espoir dans l’avenir de l’humanité.

L’importance donné à l’humain, à la vie, le refus absolu de toute pratique mortifère sont pour moi un chemin qui mène à la lumière.

Je vous remercie.